Le Starship, anciennement appelé Big Falcon Rocket (BFR), est un lanceur spatial super-lourd et entièrement réutilisable développé par SpaceX, la société fondée par Elon Musk. Conçu pour transporter à terme plus de 200 tonnes de charge utile vers l’orbite terrestre basse dans sa version réutilisable, il représente une véritable révolution dans le domaine spatial. Par sa conception innovante, sa puissance inégalée et son objectif de réutilisation complète, Starship ambitionne de rendre l’accès à l’espace bien plus économique et durable.
Composé de deux étages entièrement réutilisables — le booster Super Heavy et le vaisseau Starship — le lanceur vise à réduire drastiquement le coût des missions spatiales. Cette réutilisation complète, jamais réalisée à cette échelle, pourrait bouleverser le modèle économique de l’industrie spatiale. Les premiers vols d’essai suborbitaux ont été réalisés à partir d’avril 2023, marquant le début d’une série de tests ambitieux destinés à valider la conception et la récupération des deux étages.
Un développement progressif et itératif
Le développement du Starship repose sur une approche incrémentale et expérimentale, fidèle à la méthode de SpaceX. La première version, appelée Bloc 1, utilisée pour les vols d’essai jusqu’en janvier 2025, dispose d’une capacité de lancement d’environ 15 tonnes en configuration entièrement réutilisable. Haute de 121,3 mètres pour un diamètre constant de 9 mètres, cette version pèse environ 5 000 tonnes au décollage. Le premier étage, le Super Heavy, haut de 71 mètres, est commun à toutes les versions du lanceur, tandis que le second étage — le vaisseau Starship — varie selon le type de mission et incorpore directement la charge utile.
Les deux étages sont propulsés par les puissants moteurs Raptor, conçus et fabriqués par SpaceX. Ces moteurs brûlent un mélange de méthane liquide (CH₄) et de dioxygène liquide (LOX) selon un cycle à combustion étagée à flux complet, une technologie extrêmement efficace et rarement maîtrisée. Le Starship peut décoller depuis plusieurs sites de lancement : la base de Boca Chica (Starbase) au Texas, le complexe 39A du centre spatial Kennedy en Floride, ainsi que le complexe 37 de Cap Canaveral. La version opérationnelle (Bloc 3), propulsée par des Raptor 3, doit permettre de placer plus de 100 tonnes en orbite basse, marquant une avancée décisive vers une exploitation commerciale et scientifique à grande échelle.
Le développement du Starship a débuté avec la présentation du concept lors du Congrès international d’astronautique. SpaceX adopte une stratégie de tests rapides et continus : un premier prototype, le Starhopper, réalise un vol inaugural en 2019. Le développement du premier étage s’accélère dès 2021, avec des essais statiques réussis avant le premier vol complet en avril 2023. Ce lancement, bien qu’écourté par une défaillance, a permis d’importantes améliorations techniques. Les vols suivants ont progressivement validé la séparation des étages, la résistance thermique et la récupération contrôlée du booster. En octobre 2024, SpaceX réalise un exploit inédit : le rattrapage en vol du premier étage par les bras de la tour de lancement. Quelques mois plus tard, lors du neuvième vol en mai 2025, le même booster est réutilisé après seulement cinq mois, démontrant la viabilité de la réutilisation rapide, cœur du modèle Starship.
Objectifs et missions du Starship
Le Starship n’est pas seulement un lanceur orbital : il est au centre de la stratégie spatiale de SpaceX pour les prochaines décennies. Sélectionné par la NASA le 16 avril 2021 dans le cadre du programme Artemis, il servira d’atterrisseur lunaire (HLS) pour déposer les astronautes sur la Lune. Deux configurations distinctes sont prévues : une version équipée pour l’alunissage habité et une version de ravitaillement orbital, destinée à transférer les ergols nécessaires à la mission sur une orbite terrestre basse. L’objectif est de permettre le retour de l’Homme sur la Lune en 2027 avec la mission Artemis III, première étape d’un programme lunaire durable.
Parallèlement, SpaceX compte utiliser le Starship pour déployer la constellation Starlink de deuxième génération. Grâce à sa capacité d’emport exceptionnelle, un seul lancement pourra mettre en orbite plusieurs centaines de satellites. À terme, le Starship devrait remplacer les lanceurs Falcon 9 et Falcon Heavy, devenant le véhicule spatial principal de SpaceX pour toutes les missions : commerciales, scientifiques, habitées et interplanétaires.
Mais au-delà de ces objectifs immédiats, Elon Musk nourrit une ambition plus vaste : utiliser le Starship comme vecteur de la colonisation de Mars. Ce projet, au cœur de la philosophie de SpaceX, vise à faire de l’humanité une espèce multi-planétaire, capable d’assurer sa survie à long terme.
Contexte et origines du projet
L’un des principaux freins à l’expansion humaine dans l’espace reste le coût du lancement. Dès la création de SpaceX en 2002, Elon Musk s’est fixé comme mission de réduire drastiquement ce coût afin de rendre les voyages interplanétaires envisageables. Après les succès du Falcon 1 puis du Falcon 9, SpaceX a démontré la faisabilité de la réutilisation partielle d’un lanceur avec la récupération du premier étage. Ces avancées ont ouvert la voie à une nouvelle génération de fusées, encore plus puissantes et entièrement réutilisables.
L’idée d’un lanceur super-lourd est évoquée dès 2010, mais les premiers développements concrets débutent en 2012. Le concept repose sur une architecture radicalement nouvelle, rompant avec la lignée des lanceurs Falcon, tout en conservant les principes éprouvés de retour contrôlé et d’atterrissage vertical.
Des concepts initiaux à la vision interplanétaire
Lors de la conférence AIAA Joint Propulsion 2010, SpaceX présente pour la première fois un projet de fusée super-lourde : le Falcon X, haute de 75 mètres et propulsée par trois moteurs Merlin 2, dérivés des Merlin 1D, capables de développer 545 tonnes de poussée chacun. À partir de cette base, SpaceX imagine des variantes plus ambitieuses comme le Falcon X Heavy et surtout le Falcon XX, un lanceur de 100 mètres de haut et 10 mètres de diamètre, doté de six moteurs Merlin 2 pour une poussée totale de 4 625 tonnes. Ces concepts visaient déjà des capacités d’emport comprises entre 30 et 140 tonnes en orbite basse.
En 2012, Elon Musk officialise un projet encore plus audacieux : le Mars Colonial Transporter (MCT), conçu pour permettre la colonisation de Mars. Ce lanceur devait transporter plus de 100 passagers et plus de 200 tonnes de charge utile vers la planète rouge. Le moteur Raptor, alors en développement, devient la clé de cette ambition. Conçu pour fonctionner au méthane liquide et à l’oxygène liquide, il introduit un cycle à combustion étagée à flux complet, une première à cette échelle.
En 2016, lors du Congrès international d’astronautique de Guadalajara, Musk dévoile pour la première fois publiquement le Système de transport interplanétaire (ITS). Ce concept présente une fusée géante de 122 mètres de haut et 12 mètres de diamètre, capable d’emporter 300 tonnes en orbite basse en version réutilisable et jusqu’à 550 tonnes en version non réutilisable. Le premier étage, équipé de 42 moteurs Raptor, et le second, de 9 moteurs, sont tous deux conçus pour être récupérés et réutilisés. Cette version introduit déjà plusieurs principes qui seront conservés dans le Starship actuel : réservoirs autogènes, ergols sous-refroidis, pressurisation simplifiée et architecture tout-en-un en acier inoxydable.
Starship – Caractéristiques techniques détaillées
Dans sa version testée en 2025 (Bloc 2), Starship atteint 123,1 mètres de haut pour un diamètre de 9 mètres. Sa masse au décollage est d’environ 5 200 tonnes, pour une poussée totale de 7 750 tonnes, soit un rapport poussée/poids de 150 %. En mode totalement réutilisable, le Bloc 2 peut placer 35 tonnes en orbite terrestre basse. La version suivante, le Bloc 3, plus massive et équipée de moteurs Raptor 3, pourra emporter plus de 100 tonnes en orbite basse.
Le lanceur Starship / Super Heavy se compose de deux étages : le Super Heavy, premier étage commun à toutes les versions, et le vaisseau Starship, deuxième étage, dont les caractéristiques varient selon la mission (cargo, atterrisseur lunaire, tanker ou version habitée). Cette architecture évolue en permanence, car SpaceX adopte une méthode de développement itérative et incrémentale, où chaque vol apporte des améliorations techniques.
Évolution des versions du Starship
Version 1 (Bloc 1)
Première itération, utilisée pour les vols d’essai suborbitaux et quasi orbitaux entre 2023 et 2024. La fusée mesurait 121,3 m de haut et pouvait placer environ 15 tonnes en orbite basse. Elle introduit la séparation à chaud dès le deuxième vol, augmentant l’efficacité du système. Après le sixième vol (19 novembre 2024), cette version est retirée.
Version 2 (Bloc 2)
Testée en 2025, cette version bénéficie d’ailerons avant redessinés, d’une capacité de propergols accrue de 25 %, et d’une nouvelle jonction inter-réservoirs (e-dome). Le Starship Bloc 2 mesure 123,1 m, affiche une poussée de 7 500 tonnes, et peut placer environ 35 tonnes en orbite basse. Il utilise encore les moteurs Raptor 2, mais avec des conduites de méthane individuelles pour les Raptors optimisés vide. Ces changements ont causé des oscillations harmoniques lors de l’IFT-7, corrigées depuis. Produit intégralement dans la Starfactory, il a volé de IFT-7 (janvier 2025) à IFT-11 (automne 2025).
Version 3 (Bloc 3)
La version 3 introduit les moteurs Raptor 3, plus puissants, plus légers et mieux refroidis. Le booster gagne quelques mètres et intègre désormais une structure fixe au lieu d’un anneau largable. Deux plaques de déconnexion rapide assurent l’alimentation en méthane et oxygène liquide. Incompatible avec le premier pas de tir de Boca Chica, le Bloc 3 sera lancé depuis le deuxième pas de tir. Il vise une capacité supérieure à 100 tonnes en orbite basse, avec un premier vol prévu fin 2025.
Version 4 (à partir de 2027)
Encore en conception, le Bloc 4 atteindra environ 150 mètres de haut pour une masse totale de 7 500 tonnes. Il sera équipé de neuf moteurs Raptor sur le deuxième étage et de versions améliorées sur le booster. Objectif : plus de 200 tonnes de charge utile en orbite basse, tout en restant entièrement réutilisable.
Premier étage : Super Heavy
Le Super Heavy est le cœur du système Starship. Haut de 71 mètres, il contient environ 3 600 tonnes d’ergols pour une masse à vide estimée entre 160 et 200 tonnes. Sa structure en acier inoxydable 304L (4 mm d’épaisseur) résiste aux températures cryogéniques et aux contraintes mécaniques extrêmes. La propulsion repose sur 33 moteurs Raptor, disposés en trois cercles : 20 moteurs fixes sur la couronne externe, 10 moteurs orientables électriquement sur la couronne intermédiaire, et 3 moteurs centraux orientables pour les phases de retour et d’atterrissage. Ces moteurs développent une poussée combinée de 7 750 tonnes, soit plus du double de la Saturn V. Le Super Heavy utilise des propulseurs à gaz froid pour le contrôle d’attitude, ainsi que des réservoirs auxiliaires pressurisés pour les redémarrages en microgravité. La récupération du booster se fait grâce aux bras mécaniques de la tour Mechazilla, qui le capturent en vol pour le replacer directement sur la table de lancement. Ce système supprime le besoin d’un train d’atterrissage, réduisant ainsi la masse et les coûts.
Anneau inter-étages
L’anneau inter-étages, d’environ deux mètres de haut, relie les deux étages et permet la séparation à chaud. Il est doté de perforations pour évacuer les gaz du deuxième étage et d’un bouclier thermique protégeant le réservoir supérieur du booster. Initialement largué lors des premiers vols, il restera à terme solidaire du premier étage afin d’assurer une réutilisation totale.
Deuxième étage : Starship (le Ship)
Le vaisseau Starship agit comme étage supérieur et véhicule spatial. Dans la configuration 2025, il mesure 50 mètres de haut, 9 mètres de diamètre, embarque 1 200 tonnes d’ergols et une poussée totale de 1 500 tonnes. Il transporte la charge utile dans sa section avant : un volume pressurisé d’environ 1 000 m³, équivalent à celui de la Station spatiale internationale. Le vaisseau est propulsé par six moteurs Raptor : trois moteurs centraux à tuyère courte (rallumables et orientables), et trois moteurs optimisés pour le vide à grande tuyère (non orientables). Des volets aérodynamiques avant et arrière assurent le contrôle durant la rentrée atmosphérique, tandis que des réservoirs auxiliaires pressurisés alimentent les moteurs pour l’atterrissage propulsif.
Bouclier thermique et matériaux
Le Starship est protégé par un bouclier thermique hexagonal constitué de tuiles résistantes à plus de 1 370 °C. Ces tuiles sont fixées sur la paroi métallique via une couche isolante en laine minérale. En cas de défaillance locale, SpaceX envisage d’ajouter des systèmes de refroidissement actif. La structure en acier inoxydable, plus robuste que l’aluminium utilisé sur la navette spatiale, offre une excellente résistance thermique et mécanique tout en étant économique à produire.
Le moteur Raptor
Les moteurs Raptor, utilisés sur les deux étages, constituent une innovation majeure. D’une hauteur de 3,1 mètres pour un diamètre de 1,3 mètre, ils fonctionnent selon un cycle de combustion étagée à flux complet avec un mélange de méthane et d’oxygène liquide. Trois générations ont été développées : Raptor 1 (185 tonnes de poussée, 250 bars), Raptor 2 (230 tonnes, 300 bars), et Raptor 3 (300 tonnes, 350 bars). Ce dernier atteint un rapport poussée/poids record de 184 et une impulsion spécifique de 382 secondes dans le vide. Ces moteurs sont entièrement réutilisables, produits en grande partie grâce à l’impression 3D, et optimisés pour une maintenance minimale.
Sites de fabrication et bases de lancement
Les principaux éléments du Starship sont construits à la Starfactory de Boca Chica (Texas), à proximité du site de lancement Starbase. Les moteurs Raptor sont produits à Hawthorne (Californie) et testés sur le site de McGregor (Texas). Le lanceur peut décoller depuis Starbase au Texas, base historique du programme, ou depuis le complexe 39A du Kennedy Space Center en Floride, ancien site des missions Apollo et de la navette spatiale. Un deuxième pas de tir est en construction à Starbase pour accueillir les versions les plus récentes du lanceur.
Installations de lancement
La table de lancement (OLM) supporte les 5 000 tonnes du lanceur. Sous la base, 20 mâchoires retiennent la fusée avant le décollage, accompagnées de conduites d’hélium déclenchant l’allumage des moteurs. La tour Mechazilla, haute de 145 mètres, assemble et récupère le booster grâce à ses bras mobiles. Les ergols et gaz sont stockés dans des réservoirs cryogéniques proches du pas de tir. Un système de déluge projette de l’eau sous pression pour protéger les structures du jet des moteurs et réduire le bruit du décollage.
Déroulement d’un vol type
Après remplissage des réservoirs cryogéniques, les 33 moteurs du Super Heavy s’allument. La séparation intervient après environ deux minutes et quarante-huit secondes, à 75 km d’altitude et 5 600 km/h. Le booster rallume ses moteurs pour un retour propulsé et est capturé par la tour. Le vaisseau Starship poursuit sa montée, effectue sa mission, puis entame une rentrée atmosphérique contrôlée en position ventrale avant de pivoter et d’atterrir verticalement à l’aide de ses moteurs.
Comparaison avec d’autres lanceurs super-lourds
Le Starship dépasse tous les lanceurs précédents en puissance et capacité. La version V3 (2025) mesure 124 m pour 5 900 tonnes et peut placer plus de 100 tonnes en orbite basse. À titre de comparaison, la Saturn V atteignait 110 m pour 140 tonnes en orbite basse, et le SLS Block II prévoit 130 tonnes. Le Falcon Heavy, actuellement le plus puissant lanceur opérationnel, atteint 70 m et 64 tonnes sans récupération. Le Starship est ainsi le lanceur le plus puissant jamais construit.
Déclinaisons du Starship
SpaceX prévoit plusieurs variantes du vaisseau selon les missions : le Starship HLS, version développée pour la NASA et le programme Artemis, capable de déposer 100 tonnes sur la Lune ; le Starship Tanker, conçu pour le transfert d’ergols en orbite ; le Starship Cargo, dédié au lancement de satellites Starlink et d’autres charges utiles massives ; le Starship Surface Cargo, destiné au transport de matériel sur la Lune ; le Starship Crew, version habitée pouvant transporter jusqu’à 100 passagers ; et enfin le Starship Deep Space, conçu pour des missions interplanétaires longues.
Coûts et performances économiques
Le développement du programme Starship représente un investissement estimé à plus de 5 milliards de dollars, dont deux milliards pour l’année 2023. SpaceX vise un coût de lancement inférieur à 200 dollars par kilogramme, soit environ 20 millions de dollars pour une mission de 100 tonnes, contre plusieurs centaines de millions pour les lanceurs traditionnels. Cette réduction historique repose sur la réutilisation complète du lanceur et des coûts d’exploitation extrêmement faibles.
Tests orbitaux
Bloc 1 (2023–2024)
IFT-1 — 20 avril 2023 (B7 / S24, Pad orbital 1, Starbase, Texas). Altitude maximale 39 km, durée 00:04:02. Premier vol d’essai orbital du Starship, profil « presque orbital ». Échec au lancement, amerrissages non prévus pour le booster et le vaisseau.
IFT-2 — 18 novembre 2023 (B9 / S25, Pad orbital 1). Altitude 149 km, durée 00:08:00. Ajout de la séparation à chaud et d’un système de déluge. Les 33 moteurs du premier étage fonctionnent au décollage, la séparation à chaud réussit. Échec partiel côté booster qui explose après la séparation, échec côté vaisseau qui explose après ~8 minutes de vol.
IFT-3 — 14 mars 2024 (B10 / S28, Pad orbital 1). Altitude 224 km, durée 00:49:35. Succès du lancement et de la séparation; amerrissage du Super Heavy manqué (certains moteurs ne se rallument pas). Trois nouveaux tests prévus pour le vaisseau : ouverture de la porte de soute (réussi), transfert d’ergols interne (réussi), rallumage d’un moteur (non effectué). Le vaisseau perd le contrôle d’attitude à la rentrée et se désintègre ~65 km d’altitude.
IFT-4 — 6 juin 2024 (B11 / S29, Pad orbital 1). Altitude 213 km, durée 01:05:57. Succès au lancement; amerrissages contrôlés des deux étages. Malgré la perte d’un moteur du booster et des dommages sur un aileron du vaisseau à ~50 km d’altitude, les deux engins atteignent leurs profils d’amerrissage. Aucun rapport d’incident demandé par la FAA.
IFT-5 — 13 octobre 2024 (B12 / S30, Pad orbital 1). Altitude 201 km, durée 01:05:53. Succès; le booster est récupéré par la tour de lancement. Le vaisseau amerrit de manière contrôlée avec moins de dégâts grâce à des tuiles thermiques largement modifiées et une couche ablative sous les zones sensibles. Objectif principal : mesures détaillées.
IFT-6 — 19 novembre 2024 (B13 / S31, Pad orbital 1). Altitude 228 km, durée 01:05:24. Succès; objectif atteint avec le rallumage d’un Raptor central du vaisseau dans l’espace. La capture du booster par la tour est annulée, amerrissage contrôlé puis explosion après s’être couché dans l’eau. Le vaisseau amerrit en douceur (atterrissage non prévu).
Bloc 2 (2024–2025)
IFT-7 — 16 janvier 2025 (B14 / S33, Pad orbital 1). Altitude 146 km, durée 00:22:27. Échec partiel au lancement, succès de la récupération du booster par la tour; échec côté vaisseau (auto-destruction en vol). Objectifs : tester la V2 du second étage (avionique repensée, +25 % d’ergols, volets affinés) et déployer 10 simulateurs Starlink. Décollage, séparation et capture booster nominales; défaillances moteurs sur le vaisseau, perte de télémétrie et désintégration confirmée (observations Turques-et-Caïques). Cause identifiée par SpaceX : réponses harmoniques plus élevées que prévu provoquant des fuites de propergols.
IFT-8 — 6 mars 2025 (B15 / S34, Pad orbital 1). Altitude 146 km, durée 00:09:43. Échec partiel au lancement, succès de la récupération booster par la tour; échec côté vaisseau (auto-destruction en vol). Objectifs identiques à IFT-7 et test d’un angle de rentrée plus agressif pour B15. Décollage, séparation et capture booster nominales; deux défaillances moteur lors de la rétropropulsion du booster, une seule relance lors du rattrapage. Le vaisseau entre en vrille, perte de communication et désintégration au large des Bahamas.
IFT-9 — 27 mai 2025 (B14-2 / S35, Pad orbital 1). Altitude 189 km, durée 00:46:50. Échec partiel au lancement; amerrissage non prévu et non contrôlé du booster; échec du vaisseau (désintégration à la rentrée). Objectifs : retester la V2 du second étage et tenter une rentrée booster à angle d’attaque élevé (pas de récupération). Première réutilisation d’un Super Heavy (B14) avec 29 moteurs déjà volés. Ascension et séparation nominales; premier « retournement directionnel » contrôlé du booster réussi. La descente de méthane rompt au rallumage d’atterrissage (angle trop agressif), explosion du booster au-dessus du Golfe du Mexique. Le vaisseau atteint l’extinction moteurs (première pour la V2), mais une surpression méthane entraîne perte d’attitude; passivation et vidange des ergols, annulations du déploiement de 8 simulateurs Starlink et du rallumage moteur; désintégration à ~59 km au-dessus de l’océan Indien.
IFT-10 — 27 août 2025 (B16 / S37, Pad orbital 1). Altitude 192 km, durée 01:06:38. Succès; amerrissages contrôlés des deux étages. Profil identique aux trois essais précédents : rallumage en orbite, déploiement de 8 simulateurs Starlink, tests TPS dont refroidissement actif. Décollage nominal malgré l’arrêt précoce d’un moteur. Le booster exécute rétropropulsion, chute contrôlée et arrêt à ~200 m de la surface, comme prévu. Le vaisseau atteint SECO nominal, ouvre la porte de soute, déploie les simulateurs, rallume un moteur avec succès, puis réalise une rentrée contrôlée malgré des dégâts localisés. Tous les objectifs sont atteints.
IFT-11 — 14 octobre 2025 (B15-2 / S38, Pad orbital 1). Altitude 192 km, durée 01:06:24. Succès; amerrissages contrôlés. Vol très proche d’IFT-10 avec fuselage mieux préservé. Ajout d’une manœuvre d’approche latérale aérodynamique avant amerrissage pour simuler une future approche de tour en vol orbital. La protection thermique apparaît en meilleur état que sur IFT-10, malgré quelques détériorations prévues pour essais. Dernier vol du Bloc 2 avant le passage au Bloc 3 et la mise en service d’une nouvelle tour et plateforme.
Bloc 3 (2026)
IFT-12 — prévu en 2026 (B18 / S39, Pad orbital 2). Détails à venir.
Missions
Le Starship a vocation à remplacer, à terme, l’ensemble des véhicules spatiaux de SpaceX. Elon Musk vise un coût par lancement inférieur à celui d’une Falcon 9, voire d’une Falcon 1, grâce à la réutilisation complète des deux étages, à la récupération du booster sur son pas de tir pour une remise en vol rapide et à la construction en acier inoxydable. Les missions envisagées couvrent le lancement de satellites (notamment la constellation Starlink de deuxième génération), le ravitaillement et le transport d’équipage vers l’ISS, le transport de charges utiles sur la Lune et la desserte habitée de la Lune. Starship doit lancer les satellites Starlink V2 (capacité d’emport de masse et de volume accrue), avec un modèle économique lié : des lancements Starship moins chers facilitent Starlink, et les revenus Starlink financent Starship. Hors écosystème SpaceX, Superbird-9 (satellite de télécommunication ~3 t à sec) est le premier contrat commercial connu, avec un lancement géostationnaire visé autour de 2028. La version habitée pourrait également servir au tourisme spatial, par exemple pour le troisième vol du programme Polaris annoncé par Jared Isaacman.
Vols orbitaux prévus (sélection)
Premier lancement Starlink par Starship Cargo : date à déterminer.
Polaris III (premier vol habité de Starship) : date à préciser.
HLS Demo (atterrissage lunaire de démonstration, HLS Starship) : au plus tôt 2026.
Artemis III (premier retour prévu de l’Homme sur la Lune avec HLS Starship) : au plus tôt 2027.
Starship Surface Cargo pour un atterrissage sur Mars : au plus tôt 2026.
Programme Polaris
Annoncé en février 2022, il associe SpaceX et Jared Isaacman et comprend trois premières missions, dont la dernière doit constituer le premier vol habité du Starship.
Projet DearMoon
Contrat annoncé en septembre 2018 pour un survol lunaire habité à bord de Starship, animé par Yūsaku Maezawa(invitation de 6 à 8 artistes). Le voyage était prévu sur ~6 jours. En 2024, Maezawa annule la mission.
Programme Artemis
Le 16 avril 2021, la NASA choisit Starship HLS comme atterrisseur lunaire du programme Artemis. L’architecture comprend un atterrisseur HLS, des ravitailleurs et un dépôt d’ergols lancés depuis la Terre; les ravitailleurs remplissent le dépôt, qui alimente ensuite le HLS. Les astronautes rejoignent l’orbite lunaire à bord d’Orion (lancé par SLS), s’amarrent à HLS pour l’alunissage, puis reviennent sur Orion pour le retour Terre. À terme, des transferts pourraient passer via la station Lunar Gateway.
Usages potentiels
Starship augmente drastiquement les libertés de conception grâce à sa coiffe de 9 m et à une capacité >100 t en LEO, extensible au-delà de l’orbite basse par ravitaillement orbital. La réutilisabilité doit réduire les coûts et élargir l’accès à l’espace. Si certains estiment que le coût de lancement ne représente qu’une fraction du coût des grandes missions scientifiques, cette vision ne prend pas toujours en compte la capacité volumique et la masse offertes par Starship, qui permettent des architectures plus simples, moins miniaturisées et potentiellement moins coûteuses. Cela ouvre la voie à des satellites lourds (ex. projets K2 Space), des stations modulaires de grand diamètre (Gravitics, Vast, ThinkOrbital), des liaisons passagers suborbitales intercontinentales en moins d’une heure (avec des réserves sur l’acceptabilité physiologique), une évacuation de débris orbitaux, ou encore la construction d’un télélescope spatial géant surpassant Hubble et approchant voire dépassant l’échelle de JWST grâce au volume disponible. La US Space Force étudie aussi l’emploi de Starship pour du fret orbital et un programme Rocket Cargo (contrat 102 M$ sur 5 ans) focalisé sur le transport de charge utile.
Exploration spatiale
La capacité d’emport autorise des télescopes très ambitieux (ex. LUVOIR-like), des sondes vers Neptune, Io ou des retours d’échantillons massifs. Les coûts de matériaux et de qualification pourraient baisser en privilégiant des composants plus courants lorsque la masse n’est plus critique. Les avis divergent sur l’impact global sur les budgets scientifiques, mais l’augmentation de volume et de masse utile permet d’envisager des concepts jusqu’ici hors d’atteinte.
Colonisation de l’espace
Starship est pensé pour des missions martiennes habitées. Le profil imaginé comprend un lancement en LEO, un ravitaillement par ~5 tankers, puis un transfert vers Mars. Sur place, l’ISRU (réaction de Sabatier) produirait méthaneet oxygène à partir d’eau et de CO₂ martiens pour le retour. SpaceX affiche l’ambition lointaine d’établir une présence humaine durable (jusqu’à des flottes de Starship lors de fenêtres favorables), tout en reconnaissant que les échéancesannoncées publiquement évoluent avec l’état réel du développement. Les aspects de radioprotection, de systèmes de vieet de ravitaillement détaillés seront précisés au fil des démonstrations.

