Le budget proposé par l’administration Trump pour la NASA en 2026 marque un recul sans précédent de l’investissement américain dans la recherche spatiale. En réduisant les fonds alloués à la science de près de moitié, les États-Unis risquent d’abandonner leur leadership dans l’exploration du système solaire au profit de la Chine, selon plusieurs scientifiques et responsables du secteur.
Une réduction budgétaire historique
Le Bureau de la gestion et du budget de la Maison-Blanche a dévoilé en mai une coupure de 24 % du budget global de la NASA, ramenant ses crédits de 24,8 milliards en 2025 à 18,8 milliards pour 2026. La science spatiale, pilier de l’exploration robotique et astrophysique, verrait ses financements chuter de 47 %, menaçant directement 41 missions scientifiques en cours ou en développement.
Outre les coupes dans les programmes robotiques et d’observation, la NASA pourrait perdre plus d’un quart de son personnel, revenant à un effectif équivalent à celui de 1961, à l’aube de l’ère spatiale américaine. Les infrastructures majeures, telles que le télescope à rayons X Chandra, font partie des projets susceptibles d’être arrêtés faute de soutien financier.
Retour sur la Lune au détriment de la science
L’administration justifie ces réductions par le souhait de recentrer les priorités sur l’exploration humaine. Plus de 8 milliards de dollars seraient ainsi alloués aux missions habitées, dont le programme Artemis, qui vise à établir une présence humaine sur la Lune avant la Chine. Cette orientation favorise également une future mission martienne, bien que son calendrier reste incertain.
Par ailleurs, certaines initiatives éducatives accusées de promouvoir une approche « woke STEM » seraient également visées. Ce repositionnement idéologique s’inscrit dans un objectif plus large de réduction du rôle de l’État fédéral jugé trop coûteux et bureaucratique.
Impact direct sur la recherche et les instruments spatiaux
La réduction drastique des fonds affecterait plusieurs missions emblématiques. Les télescopes Hubble et James Webb, bien que préservés pour l’instant, subiront une restriction sévère de leurs opérations. La mission MAVEN, essentielle pour l’analyse de l’atmosphère de Mars, pourrait disparaître sans espoir de relance, son redémarrage coûtant plus d’un milliard de dollars.
Selon John O’Meara, astronome au Keck Observatory : « Les missions produisent des données, mais sans les personnes pour les interpréter, ces données ne valent rien. »
Risques pour la relève et désengagement structurel
L’avenir du secteur est également mis en péril. La suppression d’emplois et la perte de projets mobilisateurs pourraient décourager une génération entière de scientifiques. Lisa Upton, spécialiste du Soleil, s’inquiète : « Ce message que les emplois dans la science spatiale ne valent pas la peine est décourageant pour les jeunes qui veulent entrer dans ce domaine. »
Avec moins de missions, moins de données et moins de recherches, les États-Unis s’exposent à une érosion de leur expertise, actuellement inégalée. Cette tendance affaiblit tout l’écosystème scientifique et affecte particulièrement les États comme le Colorado, où de nombreuses programmations scientifiques sont en jeu.
Leadership américain menacé face à la Chine
Sur le plan géopolitique, les conséquences pourraient être durables. La Chine investit massivement dans son programme spatial, avec des sondes lunaires, des missions martiennes, et une station orbitale opérationnelle. En renonçant à sa capacité scientifique, Washington risque de perdre son rang de première puissance spatiale.
Casey Dreier, analyste à The Planetary Society, alerte : « Si ce budget devient réalité, nous connaîtrons la plus faible force de travail de la NASA depuis les années 1960, avant que le premier Américain ne soit lancé dans l’espace. »
À travers cette bascule de stratégie, les États-Unis pourraient involontairement transférer leur avance dans le système solaire à leur principal rival, affaiblissant leur influence technologique, scientifique et stratégique dans l’espace à long terme.
Une opposition croissante au sein de la communauté scientifique
Les critiques du monde académique, comme celles d’organisations à but non lucratif, se multiplient face à ce budget qu’ils jugent dévastateur. Les chercheurs pointent le paradoxe d’investir dans des buts lointains comme Mars tout en détruisant les fondations scientifiques nécessaires à leur réussite.
L’annulation de projets robotiques nuira à la compréhension du climat des planètes, des origines du système solaire et des conditions d’habitabilité — autant de données essentielles pour préparer des vols habités durables vers Mars.
Conclusion : une rupture stratégique aux lourdes conséquences
La proposition budgétaire pour 2026 représente plus qu’un ajustement financier. Il s’agit d’une réorientation stratégique profonde de la politique spatiale américaine, qui sacrifie la science au profit de l’ambition d’une présence humaine sur la Lune. Si elle est adoptée, cette décision fragilisera la place historique des États-Unis dans l’espace.
Pour les experts et les scientifiques, le prix à payer pourrait être élevé : perdre l’avantage dans l’exploration du système solaire et céder la direction de la prochaine grande ère spatiale à la Chine.