Des poussières vieilles de plus de 4 milliards d’années, rapportées sur Terre par la mission OSIRIS-REx depuis l’astéroïde Bennu, révèlent une histoire complexe et fascinante des origines du système solaire. Situé à environ 320 millions de kilomètres de la Terre, Bennu s’impose aujourd’hui comme une véritable capsule temporelle, renfermant des indices essentiels sur les conditions qui ont précédé l’émergence de la vie sur notre planète.
Une mission ambitieuse à la conquête des origines
Lancée par la NASA en septembre 2016, la mission OSIRIS-REx a atteint Bennu en décembre 2018. Après deux ans d’observations minutieuses, la sonde a collecté un échantillon de poussière et de roches le 20 octobre 2020. La capsule, contenant environ 122 grammes de matériau extraterrestre, est revenue sur Terre le 24 septembre 2023 dans le désert de l’Utah.
Ce retour marque une étape historique dans l’exploration planétaire. Pour la première fois, des scientifiques peuvent analyser en détail des particules formées aux débuts du système solaire avec un niveau de pureté et d’intégrité inégalé.
Un puzzle météoritique d’origines multiples
Les analyses publiées en août 2025 dans Nature et Nature Astronomy révèlent que Bennu est constitué de matériaux provenant de différentes régions du système solaire. Certains fragments pourraient même avoir une origine interstellaire.
Cette diversité confirme que les composants initiaux de notre système planétaire se sont formés dans des environnements multiples avant de converger par accrétion. Bennu témoigne donc d’un brassage cosmique qui a précédé la formation des planètes.
Des traces d’eau et une chimie prébiotique
Plus frappant encore, les chercheurs ont identifié des minéraux altérés par l’eau, signifiant que l’astéroïde parent de Bennu a connu une activité hydrothermale. Ces réactions ont modifié sa composition chimique et créé un terrain propice à la synthèse de molécules complexes.
Parmi elles figurent des composés organiques prébiotiques, des sels hydratés et des éléments considérés comme les premiers ingrédients de la vie.
Ces résultats appuient l’hypothèse selon laquelle des astéroïdes auraient pu transporter sur la jeune Terre des matériaux essentiels à l’apparition de la vie, comme des acides aminés ou des bases nucléiques.
Vieillissement spatial : l’empreinte du vide
Les chercheurs ont aussi observé les effets de l’environnement spatial sur les poussières de Bennu. L’exposition prolongée à l’irradiation solaire et aux micrométéorites entraîne une altération progressive des surfaces, modifiant leur structure nanoscopique.
Ce phénomène d’altération spatiale offre un éclairage nouveau sur l’évolution des petits corps célestes, souvent dépourvus d’atmosphère protectrice.
Une moisson scientifique aux implications profondes
Les découvertes issues de Bennu redessinent notre compréhension de la chimie cosmique. Elles démontrent que les éléments précurseurs de la vie étaient déjà présents bien avant l’apparition de la biosphère terrestre. Cela suggère que les conditions nécessaires à la vie pourraient exister ailleurs dans l’univers.
Par ailleurs, l’étude de ces échantillons ouvre de nouvelles perspectives pour comprendre la formation planétaire et les mécanismes de circulation de matière dans le système solaire primitif.
Vers de nouvelles explorations : cap sur Apophis
Forte de ce succès, la mission OSIRIS-REx entre dans une nouvelle phase sous le nom OSIRIS-APEX. Elle se dirige désormais vers l’astéroïde 99942 Apophis, qu’elle atteindra en avril 2029. Cette mission offrira une opportunité unique d’étudier un astéroïde lors de son passage très proche de la Terre.
Repères chronologiques de la mission
- 8 septembre 2016 : lancement de la sonde OSIRIS-REx.
- 3 décembre 2018 : arrivée à Bennu.
- 20 octobre 2020 : prélèvement de l’échantillon.
- 10 mai 2021 : départ de l’astéroïde.
- 24 septembre 2023 : retour de la capsule sur Terre.
- Août 2025 : publication des études scientifiques dans plusieurs revues spécialisées.
Un avenir façonné par les poussières cosmiques
La mission OSIRIS-REx illustre magistralement l’importance des prélèvements extraterrestres. En ramenant sur Terre des matériaux vierges, ces missions comblent les lacunes laissées par l’observation à distance ou par les météorites fragmentées par l’atmosphère.
Avec Bennu, les scientifiques disposent d’un véritable laboratoire naturel, vieux de plusieurs milliards d’années : une fenêtre ouverte sur l’aube du système solaire et peut-être, sur les origines mêmes de la vie.