Le programme Artemis de la NASA se rapproche lentement mais résolument de son objectif : ramener des humains sur la Lune plus d’un demi-siècle après le dernier alunissage d’Apollo 17. Au cœur de cette ambitieuse entreprise se trouve la version lunaire du vaisseau Starship de SpaceX, le Human Landing System (HLS), fondé sur l’architecture évoluée Block 3 de Starship. Ce véhicule jouera un rôle critique pour déposer deux astronautes sur le pôle sud lunaire dans le cadre de la mission Artemis III, attendue entre 2027 et 2028.
Une évolution technique tournée vers la Lune
Le Starship Block 3, socle du HLS, incarne la nouvelle génération du lanceur ultra-lourd de SpaceX. Sa conception intègre des avancées clés, notamment une architecture plus légère avec un bouclier thermique réduit sur l’arrière du booster, maintenant protégé par des tuiles métalliques. Ce choix réduit significativement la masse, un facteur essentiel pour les missions lunaires ciblant une charge utile de 100 tonnes.
D’autres modifications incluent une réorganisation des systèmes moteurs et de propulsion. Ils sont désormais repositionnés sur l’extérieur de la coiffe arrière, optimisant l’inspection post-vol et la maintenance. Plus qu’une fusée, ce modèle incarne une plateforme de transport spatial modulaire pensée pour la réutilisabilité et l’accessibilité lunaire.
Human Landing System : vers un habitat lunaire élargi
Le Starship HLS se distingue notamment par ses deux sas d’air pressurisés de 13 m³ chacun. En comparaison, le module lunaire Apollo affichait moins de la moitié de ce volume. L’espace habitable transformera l’expérience des astronautes, en offrant un environnement de travail plus fonctionnel et plus sûr lors des activités extravéhiculaires sur la surface lunaire.
Surtout, le HLS sera capable de transporter des équipements lourds, tels que des rovers lunaires, habitats prépositionnés ou infrastructures scientifiques, rendant possible l’installation d’une présence prolongée. L’accès à la Lune ne se mesurera plus en heures, mais en jours.
Progrès tangibles mais obstacles persistants
Depuis l’attribution du contrat HLS par la NASA en 2021, 49 jalons techniques majeurs ont été atteints. Ces avancées couvrent les systèmes d’amarrage, le support vie, le contrôle thermique, ainsi que la structure d’atterrissage. Des éléments de vol ont même été assemblés, dont une maquette fonctionnelle du module HLS destinée à l’entraînement.
En parallèle, SpaceX développe son infrastructure terrestre sur le site de Starbase, au Texas, et en Floride pour les essais croissants. Le vol inaugural du Block 3, prévu au premier trimestre de 2026, marquera une étape critique dans l’assurance de la fiabilité du système.
Des défis techniques à surmonter
Malgré ces progrès, des incertitudes majeures pèsent sur la réussite d’Artemis III. Le Starship n’a pas encore réussi d’atterrissage contrôlé au sol. Les tentatives réussies l’ont été en mer, et une démonstration solide est attendue avant 2027.
De plus, le HLS repose sur une chaîne complexe de ravitaillement en orbite, incluant l’envoi préalable de plusieurs tankers Starship. Ce ballet orbital doit démontrer la capacité à transférer des dizaines de tonnes de carburant cryogénique à partir de l’orbite terrestre vers une ligne lunaire. Ces essais cruciaux sont attendus tout au long de 2026.
Enfin, le calendrier d’Artemis III a récemment glissé. Prévoyant initialement un atterrissage habité dès 2025, la NASA parle désormais de 2027 voire 2028. Des défaillances techniques rencontrées sur Orion, le vaisseau de commandement, et l’absence d’un système d’atterrissage entièrement qualifié imposent une prudence accrue.
La réouverture du contrat HLS relance la rivalité
Face à ces retards, la NASA a annoncé en octobre 2025 la réouverture du processus de sélection pour le HLS. En jeu, l’arrivée de nouveaux prétendants, dont Blue Origin, bien décidé à faire valoir sa proposition alternative. La stratégie vise à sécuriser une redondance industrielle pour l’alunissage, afin d’éviter tout échec critique.
SpaceX conserve une longueur d’avance technique et budgétaire. Le HLS Starship a été sélectionné comme « l’option au coût le plus bas et aux meilleures notations techniques », selon un rapport de 2025. Mais la pression monte pour transformer ses démonstrations visuelles en capacité opérationnelle concrète.
Un système d’alunissage orbital logique et méthodique
Le scénario d’Artemis III repose sur une mécanique bien huilée. Après un lancement depuis la Terre, le Starship HLS rejoindra une orbite lunaire basse. Il y recevra un ravitaillement orbital indispensable pour son alunissage et le retour orbital.
Une fois rempli, le HLS atterrira au pôle sud lunaire. Deux astronautes en descendront, pendant que les autres resteront en orbite à bord du vaisseau Orion. Le séjour d’une semaine comprendra des sorties pour la collecte de données, l’étude de la glace polaire et la validation des équipements d’habitat lunaire. À l’issue de la mission, le HLS rejoindra l’orbite pour permettre le retour vers la Terre.
Vers une nouvelle ère de transport spatial
Le déploiement de Starship HLS ouvrirait une ère radicalement nouvelle d’exploration lunaire. Contrairement aux modules Apollo à usage unique, le HLS est conçu pour être réutilisé, autonome et capable d’acheminer des volumes logistiques inédits. Cette évolution vise à bâtir un écosystème lunaire durable, préfigurant les futures missions martiennes.
Mais pour réaliser la promesse de Starship, SpaceX devra prouver la fiabilité du système, notamment lors des vols Block 3 programmés à partir de 2026. La pression vient autant du calendrier que de la concurrence grandissante. Le retour sur la Lune ne sera pas une simple répétition d’Apollo. Il sera plus ambitieux, plus complexe, mais aussi plus incertain.
Calendrier des jalons clés
- Avril 2021 : SpaceX sélectionné pour le HLS
- 2023 : Accélération du développement Starship HLS
- Octobre 2025 : Réouverture de la compétition HLS
- Premier trimestre 2026 : Premier vol du Starship Block 3 attendu
- 2026 : Tests de ravitaillement orbital et de docking HLS–Orion
- 2027–2028 : Objectif de lancement d’Artemis III
Le chemin vers la Lune est pavé de défis mécaniques, logistiques et politiques. Le HLS de SpaceX, porté par l’architecture Block 3, pourrait bien en être la clé. Mais comme l’a récemment résumé un responsable du programme Artemis : « SpaceX has made substantial progress but still has a long way to go ».



