SpaceX alerte sur une “pollution orbitale catastrophique” causée par un rival pourtant bien moins envahissant

Elon Musk hausse le ton. Le dirigeant de SpaceX a récemment déposé une plainte officielle auprès de la Federal Communications Commission (FCC), dénonçant la politique jugée « irresponsable » d’une startup concurrente dans le déploiement de satellites. Pourtant, SpaceX est directement responsable de plus de 60 % des satellites actuellement en orbite terrestre basse. Cette nouvelle dispute entre acteurs du spatial soulève des questions cruciaux sur la durabilité de l’espace et la régulation d’un secteur en plein essor.

Quand le principal acteur de la saturation orbitale accuse un autre de pollution spatiale

Dans une lettre adressée à la FCC en juillet 2025, SpaceX accuse la société AST SpaceMobile de contribuer à la congestion orbitale par le lancement de satellites géants, les modèles BlueBird. Ceux-ci se distinguent par leur taille importante, équipée de panneaux solaires comparables à un court de tennis, et par leur extrême brillance, ce qui les rend visibles à l’œil nu. Leur prototype, BlueWalker 3, est d’ailleurs catalogué comme l’un des objets les plus lumineux du ciel nocturne.

Cette accusation peut sembler ironique. En effet, la constellation Starlink de SpaceX regroupe déjà plus de 8 000 satellites actifs autour de la Terre, assurant une couverture Internet à travers 140 pays pour plus de 6 millions d’abonnés. Contrairement à ceux d’AST, les satellites Starlink sont plus petits, capables de manœuvrer en orbite et conçus pour limiter la pollution lumineuse. Musk défend une architecture plus respectueuse des normes spatiales, malgré le volume massif déployé.

Une rivalité télécommandée par des intérêts économiques et techniques

Derrière la dispute technique, c’est aussi une lutte commerciale. Depuis plusieurs années, SpaceX et AST SpaceMobile s’affrontent pour l’accès aux bandes radioélectriques et aux licences orbitales. En octobre 2024, AST avait déjà annoncé une plainte similaire, accusant Elon Musk de tactiques anticompétitives. Selon AST, SpaceX utiliserait sa position dominante pour entraver la progression de ses concurrents émergents, en tirant profit de sa proximité avec les régulateurs publics.

La FCC se retrouve ainsi au cœur d’un duel où chaque acteur cherche à influencer les règles du jeu. En jeu : le contrôle de l’environnement orbital, la gestion des interférences radio et la pérennité commerciale d’un secteur appelé à croître de manière exponentielle.

Risques croissants de clutterisation de l’orbite et impact sur l’environnement céleste

Au-delà du conflit entre deux entreprises, la communauté scientifique observe avec inquiétude la multiplication rapide des objets en orbite basse (LEO). Cette zone sature, augmentant les risques de collision et de chaînes de débris, un phénomène connu sous le nom d’effet Kessler. Une telle situation pourrait compromettre à long terme l’utilisation sûre de certaines orbites clés.

La pollution lumineuse constitue un autre sujet sensible. Les larges panneaux réfléchissants de certains satellites, comme ceux de BlueBird, perturbent les observations astronomiques au sol. Des observatoires de renom signalent désormais des images compromises et réclament une régulation mondiale des magnitudes lumineuses satellites autorisées.

La FCC sous pression pour trancher entre innovation, concurrence et écologie spatiale

Face à ces tensions, la FCC multiplie les initiatives. Depuis 2023, elle adapte son approche en lançant le programme « Supplemental Coverage from Space » visant à harmoniser les opérations des constellations, notamment entre partenaires comme T-Mobile et Starlink. Cependant, avec l’arrivée de projets comme Amazon Kuiper (78 satellites lancés en 2025), l’administration est confrontée à une compétition toujours plus féroce.

Alors que chaque initiative privée pousse ses innovations, les régulateurs doivent désormais arbitrer entre créer les conditions d’une connectivité globale et préserver l’environnement orbital, encore aujourd’hui peu protégé par le droit international.

Saturation, coopération ou confrontation ? Ce que l’avenir orbital dévoile

Si SpaceX prétend agir pour garantir la sécurité dans l’orbite basse, les critiques se multiplient. Pour beaucoup, la société d’Elon Musk est à la fois juge et partie dans un débat sur l’encombrement spatial qu’elle a elle-même amplifié. Les concurrents demandent quant à eux un espace plus équitable, sans verrouillage réglementaire par des géants du secteur.

Une coordination internationale semble désormais indispensable. Comme dans le trafic aérien, une densification sans contrôle mènerait à un chaos orbital. La question n’est plus de savoir si la réglementation multilatérale est nécessaire, mais quand elle sera adoptée à l’échelle planétaire.

Données clés

  • SpaceX détient environ 60 % des satellites LEO, soit près de 8 000 satellites.
  • AST SpaceMobile utilise des satellites très brillants, à haute interférence visuelle.
  • Amazon Kuiper a lancé 78 satellites en 2025 pour ses débuts dans l’Internet spatial.
  • Le programme FCC “Supplemental Coverage from Space” vise à encadrer les déploiements satellites conjoints.

Conclusion

L’affrontement entre SpaceX et AST SpaceMobile illustre les tensions grandissantes d’un secteur spatial en plein bouleversement. Si Starlink revendique une approche responsable de l’environnement orbital, sa domination numérique fragilise cet argument face aux appels à une meilleure gouvernance.

Alors que les entreprises spatiales privées redéfinissent nos infrastructures de communication, la préservation du ciel, tant pour des raisons scientifiques qu’environnementales, devient un défi collectif majeur. Le moment est venu pour les régulateurs mondiaux d’établir des règles claires, imposables à tous, pour éviter que l’espace ne devienne un théâtre de désordre irréversible.

Eric Durand
Eric Durand

Passionné par l’exploration spatiale, Eric Durand suit de près les avancées de SpaceX depuis des années. Sur SpaceX France, il décrypte l’actualité des lancements, des technologies et des projets de l’entreprise d’Elon Musk, avec clarté et précision.

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