Alors que SpaceX s’impose depuis des années comme un pilier du spatial américain, une brouille spectaculaire entre son fondateur Elon Musk et l’ancien président Donald Trump vient semer le doute sur la pérennité de ce partenariat stratégique.

Une alliance qui vacille
Jusqu’ici, Elon Musk et Donald Trump formaient un tandem influent. Le gouvernement américain s’est largement appuyé sur SpaceX pour ses missions spatiales les plus critiques : lancements d’astronautes de la NASA, missions sensibles pour le Pentagone, ou encore retour prévu sur la Lune. Mais un échange musclé entre les deux hommes sur les réseaux sociaux a marqué un tournant. Trump a menacé de couper les subventions et contrats fédéraux de SpaceX, tandis que Musk a rétorqué – avant de se raviser – qu’il pourrait retirer du service sa capsule Dragon, vitale pour les vols habités de la NASA.
Un partenariat trop stratégique pour être rompu ?
Malgré les tensions, les experts jugent improbable une rupture franche. SpaceX occupe aujourd’hui une place centrale dans le paysage spatial américain. Grâce à sa cadence de lancements inégalée et ses coûts maîtrisés, l’entreprise a obtenu des contrats majeurs avec différentes agences fédérales, couvrant à la fois la recherche scientifique et la sécurité nationale.
Selon Clayton Swope, spécialiste du Centre d’études stratégiques et internationales (CSIS), retirer SpaceX des programmes actuels provoquerait des interruptions majeures, notamment pour la NASA et le ministère de la Défense. Il rappelle que sans SpaceX, les États-Unis, et leurs partenaires comme l’Europe, le Canada ou le Japon, devraient à nouveau se tourner vers la Russie pour accéder à la Station spatiale internationale (ISS), une option politiquement risquée dans le contexte géopolitique actuel.
Une dépendance difficile à contourner
La capsule Dragon de SpaceX est aujourd’hui le seul vaisseau américain certifié pour transporter des astronautes. Son concurrent direct, le Starliner de Boeing, cumule retards et problèmes techniques. Une rupture avec SpaceX serait donc extrêmement coûteuse pour les deux parties – un véritable « suicide stratégique », selon Swope. Il estime que l’actuelle querelle relève davantage d’un bras de fer politique que d’une remise en cause structurelle.
Des signaux inquiétants
Néanmoins, certains signes montrent que le gouvernement américain pourrait chercher à diversifier ses partenaires. La NASA a récemment évoqué la possibilité d’un vol du Starliner dès 2026. De plus, la mise à l’écart soudaine du candidat proposé pour diriger l’agence spatiale – un entrepreneur proche de Musk – ajoute à la confusion.
Cette situation pourrait profiter à des concurrents comme Blue Origin, dirigée par Jeff Bezos, ou raviver les débats autour de la dépendance de Washington au secteur spatial privé. « Cela soulève des questions sur la concentration du pouvoir dans les mains d’un petit nombre d’acteurs privés », analyse Swope.
Vers un ralentissement des ambitions spatiales ?
Pour Laura Forczyk, analyste spécialisée dans le domaine spatial, cette querelle pourrait nuire à l’ensemble de l’industrie. Si les tensions persistent, elles risquent d’entraver les projets à long terme de la NASA, déjà confrontée à des difficultés budgétaires et à l’absence de direction claire. Elle redoute un recul des ambitions spatiales américaines si les décisions politiques priment sur les impératifs techniques.
L’avenir du partenariat entre SpaceX et le gouvernement américain semble plus incertain que jamais. Même si une rupture brutale paraît peu probable, la discorde entre Elon Musk et Donald Trump met en lumière la fragilité d’une collaboration aussi stratégique qu’indispensable. Le spatial américain pourrait bien se retrouver à la croisée des chemins.