Des trous noirs dormants réveillés et dévoreurs d’étoiles : “c’est un spectacle cosmique inédit”

Grâce à sa capacité à percer les nuages cosmiques les plus opaques, le télescope spatial James Webb (JWST) a révélé un phénomène longtemps resté inaccessible : des trous noirs supermassifs dormants s’éveillant brièvement pour déchiqueter et consommer des étoiles dans des galaxies dissimulées derrière la poussière. Cette découverte, publiée le 24 juillet 2025 dans The Astrophysical Journal Letters, éclaire un aspect méconnu de ces monstres gravitationnels.

Des dévoreurs stellaires invisibles jusque-là

Dans une campagne ciblant 12 galaxies poussiéreuses, le JWST a détecté une signature infrarouge caractéristique de l’ingestion d’étoiles, appelée événement de déstruction par marée (TDE). Ce phénomène se produit lorsqu’une étoile s’aventure trop près d’un trou noir, se fait disloquer par ses forces de marée, puis est progressivement absorbée.

Grâce à sa vision dans l’infrarouge, JWST a permis d’observer pour la première fois de tels événements au cœur de galaxies obscurcies par la poussière, inaccessibles aux télescopes optiques. Sur les 12 cibles initiales, quatre TDEs ont été confirmés, dont l’un à seulement 130 millions d’années-lumière, la plus proche observation de ce type jamais réalisée.

Une nouvelle catégorie de trous noirs révélée

Contrairement aux galaxies actives, où le trou noir central accrète en continu de la matière issue de son voisinage, les trous noirs identifiés par JWST étaient à l’état inactif ou « dormant ». Ils ne consomment de matière qu’occasionnellement, notamment lorsqu’une étoile croise leur trajectoire fatale. Ce comportement sporadique marque un type d’activité encore peu exploré dans les scénarios d’évolution galactique.

« Ces observations sont les premières de ce genre avec JWST et elles ne ressemblent à rien de ce que nous avions vu avant », explique Megan Masterson, doctorante au MIT et autrice principale de l’étude. « Comprendre ce milieu dormant est une avancée majeure ».

La lumière du néon, témoin de la désintégration

Les chercheurs ont identifié une émission infrarouge intense d’ionisation du néon, causée par la matière chauffée tombant sur le trou noir. Ce signal constitue une preuve directe d’un TDE et permet de distinguer ces événements des supernovae ou d’autres processus lumineux d’origine stellaire.

En complément, les scientifiques ont utilisé les données de l’observatoire infrarouge NEOWISE pour suivre l’évolution lumineuse de ces objets, révélant des anomalies anciennes mal identifiées.

Un processus lent, mais éclairant

Contrairement à une idée reçue, l’engloutissement de l’étoile n’est pas instantané. Il s’étale sur plusieurs mois, voire années. Cette temporalité offre une fenêtre d’observation précieuse pour comprendre comment le gaz stellaire interagit avec le champ gravitationnel extrême du trou noir.

« Le trou noir met beaucoup de temps à avaler toute cette matière », précise Masterson. « Nous espérons maintenant étudier cette chronologie et caractériser son environnement pendant le processus ».

Vers une nouvelle cartographie des trous noirs

Cette découverte ouvre de multiples pistes de recherche. L’existence de trous noirs supermassifs invisibles dans les galaxies poussiéreuses suggère qu’ils pourraient être plus courants qu’on ne le pensait. En cartographiant ces événements, les astrophysiciens espèrent préciser la fréquence des TDEs et leur rôle dans la formation et l’évolution des galaxies.

Les prochaines années devraient voir ces observations se multiplier avec le JWST, qui permet désormais de lever le voile sur des régions autrefois inaccessibles. Cela pourrait amener à revoir en profondeur notre compréhension des phases d’activité des trous noirs, en particulier les transitions entre états dormants et actifs.

Données clés de l’étude

  • Nombre de galaxies analysées : 12
  • Nombre de TDEs confirmés : 4
  • Distance de l’événement le plus proche : 130 millions d’années-lumière
  • Émission détectée : ionisation du néon (signature infrarouge)
  • Date de publication : 24 juillet 2025

Perspectives scientifiques à long terme

Ces résultats, bien que prometteurs, posent plus de questions qu’ils n’offrent de réponses définitives. Les chercheurs doivent encore déterminer la durée des TDEs, leurs variations d’intensité, ainsi que les paramètres physiques des trous noirs impliqués, comme leur masse et leur rotation.

Avec des instruments comme le JWST et de futurs observatoires infrarouges, il devient possible d’envisager une surveillance à long terme des interactions extrêmes entre étoiles et trous noirs dormants, y compris dans les confins opaques de l’univers local ou lointain.

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Eric Durand
Eric Durand

Passionné par l’exploration spatiale, Eric Durand suit de près les avancées de SpaceX depuis des années. Sur SpaceX France, il décrypte l’actualité des lancements, des technologies et des projets de l’entreprise d’Elon Musk, avec clarté et précision.

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