Euclid révèle 26 millions de galaxies et trace la première carte visible de la matière noire

Euclid révèle 26 millions de galaxies et trace la première carte visible de la matière noire.

Le 19 mars 2025, l’Agence spatiale européenne (ESA) a levé le voile sur les premières données de la mission Euclid, révélant des images d’une précision sans précédent du cosmos et ouvrant une ère nouvelle dans l’exploration de la matière noire et de l’énergie noire. Ce télescope spatial, lancé le 1er juillet 2023, cartographie depuis l’espace les structures de l’Univers en 3D afin de comprendre les mécanismes invisibles à l’origine de son expansion et de sa formation.

Euclid révèle 26 millions de galaxies et trace la première carte visible de la matière noire

Une cartographie inédite du ciel lointain

Les résultats dévoilés dans le lot de données « Quick Release 1 » (Q1) couvrent 63 degrés carrés du ciel – l’équivalent de plus de 300 fois la surface de la pleine Lune – et révèlent la position et la lumière émise par plus de 26 millions de galaxies. Certaines de ces galaxies sont situées à plus de 10,5 milliards d’années-lumière, offrant une vue panoramique sur un passé cosmique lointain et encore peu exploré.

Grâce à sa capacité à observer à grande échelle, Euclid permet de visualiser la structure filamenteuse de l’Univers : un réseau cosmique où se concentrent galaxies, amas de galaxies et matière noire. Les premières images sont saisissantes : galaxies spirales aux bras disloqués, formations compactes de galaxies naines et effets lumineux produits par des lentilles gravitationnelles — autant d’éléments qui tracent les contours invisibles de l’espace.

Révélations sur la matière noire : l’invisible devient mesurable

Bien que la matière noire ne puisse être détectée directement, Euclid mesure les déformations subtiles de la lumière provenant de galaxies situées en arrière-plan. Ce phénomène, appelé lentille gravitationnelle faible, agit comme un papier carbone cosmique, mettant au jour la présence de masses invisibles au sein des amas de galaxies.

Les données initiales ont permis d’identifier plus de 500 candidats à l’effet de lentille gravitationnelle et de dresser une première carte de la matière noire dans plusieurs régions de l’Univers. Ces résultats renforcent les modèles actuels selon lesquels la matière noire structure le tissu cosmique en guidant l’agencement des galaxies à grande échelle.

L’expansion de l’Univers sous surveillance

Au cœur de la mission Euclid se trouve une autre énigme cosmique : l’énergie noire. Associée à l’accélération de l’expansion de l’Univers, cette force invisible résiste à la gravité et demeure mal comprise.

En mesurant la vitesse à laquelle les galaxies s’éloignent les unes des autres à différentes époques, Euclid vise à déterminer les propriétés de cette énergie noire et son évolution dans le temps. Son objectif est de tester des modèles de gravitation alternatifs et d’affiner la constante de Hubble, un paramètre clé dans la cosmologie.

Des outils algorithmiques et des citoyens au service de la science

Face à l’immense volume de données générées — plusieurs milliards d’objets célestes observés d’ici la fin de la mission — l’ESA mobilise des outils avancés d’intelligence artificielle pour classifier automatiquement les galaxies, identifier les anomalies et détecter les lentilles gravitationnelles rares. L’analyse s’enrichit également de la science participative, où des milliers de bénévoles examinent des images et aident à affiner les classifications.

Grâce à cette mobilisation citoyenne et technologique, plus de 380 000 galaxies ont été classifiées dès cette première publication, appuyant les chercheurs dans leur quête des structures les plus énigmatiques de l’espace profond.

Une machine à découvertes en action

En plus des objectifs principaux, Euclid surprend déjà avec des trouvailles annexes. Par exemple, la détection de nouvelles galaxies naines, jusqu’alors invisibles, ou encore la découverte de planètes errantes — des corps flottant seuls dans l’espace, sans étoile hôte — ponctuent les premiers mois de la mission.

Pour Carole Mundell, Directrice de la science à l’ESA, ces résultats montrent qu’“Euclid se révèle être une machine à découvertes. Il étudie des galaxies à une échelle gigantesque, nous permettant d’explorer notre histoire cosmique et les forces invisibles qui structurent notre Univers.”

Vers une décennie de percées scientifiques

La mission Euclid se poursuivra jusqu’en 2030, avec plusieurs phases de publication de données prévues. Une diffusion plus étendue est annoncée pour juin 2026, accompagnée d’au moins trois autres lots de résultats accélérés et deux publications majeures d’ici à la clôture de la mission.

Les scientifiques estiment que les jeux de données fournis serviront de base à la recherche fondamentale pendant des décennies, permettant de tester les modèles cosmologiques actuels, affiner les simulations numériques de la formation des grandes structures et confirmer – ou infirmer – certaines théories quantiques de la gravitation.

Un projet aux retombées sociétales et technologiques majeures

L’impact d’Euclid dépasse le seul champ académique. Accessible au grand public, la galerie d’images récoltées capte l’imaginaire collectif, tandis que l’implication des citoyens dans l’effort scientifique suggère un nouveau modèle collaboratif de production de savoir. L’initiative renforce également le leadership européen en matière d’exploration spatiale et de traitement des données massives.

Cette avancée illustre le potentiel de la coopération internationale dans les sciences fondamentales, avec la France occupant un rôle clé dans la direction scientifique de la mission. Elle incarne aussi une étape cruciale vers une compréhension unifiée de l’Univers invisible qui nous entoure.

Calendrier des jalons de la mission

  • 1er juillet 2023 : Lancement du télescope Euclid
  • 14 février 2024 : Début de l’étude cosmologique principale
  • 19 mars 2025 : Publication du premier lot de données (Q1)
  • Juin 2026 : Deuxième diffusion majeure prévue
  • 2026-2031 : Trois nouvelles diffusions rapides annoncées
  • 2030 : Fin de la mission nominale et publication de l’atlas cosmique final

Vers la compréhension de l’univers invisible

La mission Euclid offre une fenêtre inédite sur les forces invisibles qui façonnent le cosmos. À travers une cartographie détaillée et une analyse subtile des déformations lumineuses, elle s’impose déjà comme un instrument essentiel pour décrypter la nature de la matière noire et de l’énergie noire.

Les découvertes présentées ne représentent qu’une fraction des connaissances à venir. Alors que la mission continue de scruter les recoins les plus éloignés de l’espace, Euclid redéfinit les limites de notre compréhension cosmologique — avec des retombées profondes, à la fois scientifiques et culturelles.

Eric Durand
Eric Durand

Passionné par l’exploration spatiale, Eric Durand suit de près les avancées de SpaceX depuis des années. Sur SpaceX France, il décrypte l’actualité des lancements, des technologies et des projets de l’entreprise d’Elon Musk, avec clarté et précision.

Articles: 187