Un incroyable paysage sous la glace antarctique révèle un écosystème perdu vieux de 30 millions d’années

Un paysage vieux de 30 millions d'années découvert sous l'Antarctique révèle un écosystème enfoui, menacé par le réchauffement climatique.

Pris sous plus d’un kilomètre de glace depuis des millions d’années, un ancien paysage fossile vient de refaire surface — symboliquement — grâce aux travaux d’une équipe internationale de scientifiques. En Antarctique oriental, un paysage terrestre préservé, d’une superficie équivalente à celle de la Belgique, a été identifié. Ce vestige datant d’au moins 30 millions d’années révèle un monde oublié, aujourd’hui emprisonné dans les glaces, offrant une fenêtre inédite sur une époque révolue où l’Antarctique était verdoyant, sillonné de rivières et couvert de forêts.

Un incroyable paysage sous la glace antarctique révèle un écosystème perdu vieux de 30 millions d’années

Une époque oubliée sous des kilomètres de glace

Le continent le plus froid de la planète n’a pas toujours été le désert glacé qu’il est aujourd’hui. Il y a plusieurs dizaines de millions d’années, l’Antarctique oriental bénéficiait d’un climat beaucoup plus clément. Selon les scientifiques, la région abritait des lacs, des rivières et une riche végétation, dans un environnement similaire à celui de l’actuelle Tasmanie. Puis, dans un basculement climatique progressif, les températures mondiales ont chuté, conduisant à la formation de l’épaisse calotte glaciaire qui scelle aujourd’hui ces témoins du passé.

Une cartographie invisible à l’œil nu

Pour détecter ce paysage enfoui, les chercheurs ont combiné les données de satellites avec une technique de radio-écho-sondage aéroporté. En envoyant des ondes radio à travers la glace puis en analysant leurs échos, ils ont pu modéliser la topographie du sol caché. Ces relevés ont mis en évidence un réseau structuré de vallées profondes, de collines et de plateaux, analogues aux paysages d’érosion que l’on retrouve dans les zones tempérées de la planète.

La méthode non invasive a permis de repérer d’éventuels anciens lits fluviaux et bassins fermés, suggérant la présence passée de réseaux hydrographiques complexes. Ces formations géologiques n’ont probablement pas été exposées à la lumière du jour depuis des dizaines de millions d’années.

Une capsule temporelle écologique

Le paysage découvert constitue une véritable capsule temporelle géologique. En son sein, les dépôts sédimentaires préservés pourraient conserver des informations précieuses sur le climat, la végétation, et potentiellement sur la vie microbienne de cette époque révolue. Des structures similaires ont déjà livré, dans d’autres régions du globe, du pollen fossilisé et des spores, révélant une riche biodiversité aujourd’hui disparue.

Les scientifiques estiment que certaines poches d’eau liquide isolées sous la glace, comme les fameux lacs subglaciaires, pourraient encore abriter des formes de vie microbienne, évoluant dans l’isolement le plus complet depuis des millions d’années.

Menace climatique sur un monde enfoui

Si cette découverte alimente l’enthousiasme de la communauté scientifique, elle survient dans un contexte d’inquiétude croissante. La fonte accélérée de la glace antarctique, alimentée par le réchauffement climatique, pourrait compromettre l’intégrité de ce paysage fossile. D’après une récente étude parue dans Nature Climate Change, même les scénarios les plus optimistes de réduction des émissions de gaz à effet de serre ne parviendraient pas à stopper complètement la fonte de la calotte antarctique.

Cette menace soulève des enjeux critiques : la préservation de ces formations anciennes est essentielle pour reconstituer l’histoire climatique de la Terre et mieux anticiper ses évolutions futures. Chaque mètre cube de glace fondu représente une perte irréversible pour la compréhension scientifique du passé terrestre.

Un jalon scientifique majeur

Les résultats de cette recherche, publiés en octobre 2023 dans la revue scientifique Nature Communications, s’inscrivent dans un effort de longue haleine mené par des équipes britanniques et américaines. L’étude apporte la preuve qu’une grande partie de la topographie terrestre d’origine demeure encore intacte sous les glaces, malgré les changements extrêmes intervenus depuis l’Oligocène, il y a plus de 30 millions d’années.

Ce paysage figé représente bien plus qu’une curiosité géologique : il pose les fondations d’un nouveau champ d’étude interdisciplinaire impliquant géologues, climatologues, biologistes et experts des environnements extrêmes. En ouvrant une fenêtre sur une Terre ancienne, cette découverte souligne à quel point les grands archives climatiques se trouvent parfois là où on les attend le moins — sous l’immobilité silencieuse de la glace antarctique.

Eric Durand
Eric Durand

Passionné par l’exploration spatiale, Eric Durand suit de près les avancées de SpaceX depuis des années. Sur SpaceX France, il décrypte l’actualité des lancements, des technologies et des projets de l’entreprise d’Elon Musk, avec clarté et précision.

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